À la fin de la préface de ses Essais d’Analyse, Condorcet place la citation latine « vice fungar cotis, acutem reddere quae ferrum valet, exsors ipsa secandi » tirée d’un passage de l’Art poétique d’Horace (au vers 305).
On peut la traduire par : « Je tiendrai lieu de pierre à aiguiser qui permet de rendre le fer tranchant sans pouvoir elle-même couper. »
Dans ce passage Horace exprime son avis sur les fonctions de la poésie et ses différents genres, il aborde une distinction structurante entre l’ars et l’ingenium, autrement dit : la poésie est-elle affaire de génie pur (ingenium) ou de travail et d’apprentissage (ars) ?
Horace est favorable à la seconde position et s’imagine comme la pierre sur laquelle l’esprit des autres poètes pourra venir s’aiguiser pour leur permettre de réaliser leur chef-d’œuvre.
C’est ce rôle, sans doute, que se donne le jeune Condorcet, par le biais de ses Essais d’Analyse, vis-à-vis des autres mathématiciens.