Maniac
Benjamin Labatut
Présentation
DescriptifJohn von Neumann a posé les bases mathématiques de la mécanique quantique, inventé la théorie des jeux, créé le premier ordinateur moderne et joué un rôle clé dans le projet Manhattan, la construction de la bombe atomique américaine. Mais lorsque, à la fin de la Seconde Guerre mondiale, il conçoit le MANIAC, une calculatrice qui selon ses mots « saisirait la science à la gorge en libérant une puissance de calcul illimitée », personne ne se doute que le monde est sur le point de changer pour toujours. Car le MANIAC, produit d’un esprit logique, cynique et visionnaire, ouvre les perspectives infinies de l’intelligence artificielle – à même de menacer la primauté de l’espèce humaine.
Benjamín Labatut place von Neumann au centre d’un roman qui débute avec Paul Ehrenfest, physicien autrichien et ami d’Einstein devenu fou après avoir compris que la science et la technologie allaient devenir des forces tyranniques. MANIAC se conclut une centaine d’années plus tard, au cœur d’une partie de Go entre le Maître sud-coréen Lee Sedol et AlphaGo, un programme d’intelligence artificielle. Le monde assiste alors à la naissance d’une forme d’intelligence encore hybride et capricieuse, qui se trompe, mais agit aussi par inspiration pure. Et d’autres suivront, toujours plus puissantes, toujours plus terrifiantes…
Triptyque inquiétant sur les rêves du XXe siècle et les cauchemars du XXIe, MANIAC entraîne le lecteur dans les labyrinthes de la science moderne et lui laisse entrevoir l’obscurité qui la nourrit. Un roman vertigineux sur les limites de la pensée et les délires de la raison.
Note de lecture Tangente
Aux sources d’un avenir inquiétant ?
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme. » Voilà bien une maxime qui, décontextualisée des écrits de Rabelais, a été maintes fois citée en évoquant les sciences du XXe siècle. Dans son dernier roman, Benjamín Labatut propose, dans cette veine, un triptyque plutôt inquiétant. La première partie est consacrée aux dernières années de Paul Ehrenfest, physicien ami d’Einstein, angoissé par les progrès de la science et des techniques. La partie centrale narre, quant à elle, le parcours de John von Neumann, génie incroyable des mathématiques et de l’informatique, acteur clé du projet Manhattan. Sa famille, ses amis, ses collègues prennent tour à tour la parole dans ce récit choral pour donner à voir les différentes facettes du personnage : on croirait entendre des témoins appelés à la barre du tribunal de l’Histoire. L’auteur nous entraîne dans ce kaléidoscope pour assister aux fulgurances d’un esprit hors du commun, en théorie des jeux, ou dans la conception de machines. Enfin, la dernière partie se concentre sur le combat qui opposa le champion de go Lee Sedol et l’écrasante intelligence artificielle AlphaGo. Une fois le livre refermé, on saisit le propos de l’auteur dans cette juxtaposition de destins où raison et fureur, cynisme et humanité se font face, et on s’interroge sur ce que nous réserve, à l’avenir, l’essor de l’intelligence artificielle dont les prémisses apparaissent ici bien sombres.