Astronomie, dioptrique et cinétique
Nicole Oresme
Présentation
DescriptifCes deux suites de questions sur la sphère, au début des années 1340, témoignent des premiers pas de Nicole Oresme dans sa carrière intellectuelle. Encore étudiant, puis jeune maître de la faculté des Arts de Paris, il commentait par questions le petit traité De spera mundi de Jean de Sacrobosco, au croisement de la géométrie et de l’astronomie. Rédigé vers 1230, le traité de Sacrobosco constituait le manuel de cosmographie le plus diffusé dans les universités jusqu’à la révolution copernicienne (et même au-delà). Il fut souvent mentionné dans différents statuts universitaires comme texte imposé dans l’enseignement. Rappelons que l’astronomie constituait l’une des quatre disciplines du quadrivium, de l’enseignement scientifique dans les facultés des Arts.
La première suite de 17 questions, qui restait encore proche du texte de Sacrobosco, tout en se confrontant déjà à l’astrologie, était inédite et a même été inconnue jusqu’à une date récente, car on la prenait pour une version de la seconde suite de 13 questions, bien plus générale, qui, elle, n’a été transcrite que dans une thèse ronéotée, non revue ni corrigée.
Le thème de la sphère ne cessa de hanter la pensée d’Oresme qui, une vingtaine d’années plus tard, rédigea en français un Traité de l’Espere, mais la précoce série des présentes questions inaugurait une réflexion de Nicole Oresme, qui, par la suite, a planté les fondations de ce qui devint l’astrophysique, en travaillant sur la dynamique des mouvements qui parcouraient les choses de l’Univers, ainsi que sur leur luminosité. Avec cette astrophysique avant la lettre, pourrait se manifester une continuité longue dans l’oeuvre si variée d’Oresme qui pensa en philosophe, en mathématicien, en musicien, en poète et en citoyen.
Note de lecture Tangente
Le frémissement de l’astronomie moderne
Avant les écrits d’Oresme, cet ouvrage, entièrement bilingue latin-français, présente une édition du Traité de la Sphère de Jean de Sacrobosco. Ce traité, écrit vers 1230, a fait autorité jusqu’à Copernic grâce à sa concision et sa clarté géométrique (ainsi que des citations de Virgile et Lucain qui en rendent la lecture agréable), à tel point que sa lecture s’avère toujours utile aujourd’hui : « si la Terre était plate d’orient en occident, les étoiles se lèveraient aussi tôt pour les Occidentaux que pour les Orientaux, ce qui est faux. »
Quant aux deux livres de Questions sur la Sphère de Nicole Oresme, écrits vers 1340, ce sont deux écrits de jeunesse (entre 20 et 30 ans) qui répondent à des questions que les étudiants pourraient lui poser. À chaque question sont proposés de nombreux arguments pour défendre généralement la position de Sacrobosco. Sauf, cas notable parmi quelques autres : Oresme imagine que Pierre reste sur place, Platon fait le tour de l’équateur par l’ouest et Socrate par l’est. Oresme raisonne sur les méridiens (le décalage horaire, en quelque sorte) et en déduit que « Socrate aura dans le même temps un jour de plus que Pierre et […] deux de plus que Platon ». Et ainsi, Oresme entrevoit l’idée de la possible rotation de la Terre deux siècles avant Copernic !